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Les secrets de Panoramix

Depuis l'Antiquité, les druides sont des personnages énigmatiques suscitant un intérêt étrange. Qui étaient-ils vraiment ? Voir descriptif détaillé

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Le Projet

L’image que nous avons des Gaulois aujourd’hui est celle héritée du XIXe siècle lorsque la société se recherchait des héros tel que Vercingétorix. Les Gaulois sont des guerriers, moustachus de préférence, et des barbares auxquels les Romains ont apporté la civilisation. Les druides n’échappent pas à cette image d’Epinal relayée aujourd’hui par les albums d’Astérix et Obélix par le biais du personnage de Panoramix : un personnage aux pouvoirs magiques et capable de fabriquer des potions pour tout. Mais qui étaient véritablement les druides ? Quel était leur place et surtout leur rôle dans la société celtique ?

Gravure du XIXe siècle
un druide enseigne à deux autres à l’entrée d’une caverne.

Ce sujet est d’actualité : ces dernières années, de nombreux chercheurs se sont principalement intéressés aux connaissances des druides en botanique et non à leur manière de pensée et de concevoir le monde. Que savons-nous sur leurs pratiques cultuelles et leurs rapports à la nature ? Un archéologue et chercheur au CNRS, Jean-Louis Brunaux, essaye de sortir des sentiers battus. Ses travaux nous permettent de renouveler notre vision de ces personnages mystérieux.

L’étymologie même du mot druide du latin druidae est discutée. Si tous les spécialistes s’accordent pour reconnaître dans le second terme de ce composé la racine *weid- « savoir, voir », le premier terme est souvent interprété comme un préfixe intensif indo-européen dru-, d’où la traduction courante par « les très savants ». Cette explication a été critiquée, notamment par le linguiste Emile Benveniste qui part de la base *der-w/dr-ew « ferme, solide ». Le druide serait selon cette étymologie « celui qui sait fidèlement, celui qui a une vision vraie, certaine »

Les sources antiques

Aucun texte d’origine gauloise ne va répondre à nos interrogations. En effet, bien que les Celtes connaissaient l’écriture, l’oralité et la mémoire étaient privilégiées pour la transmission des savoirs. Ainsi, seuls les textes des auteurs latins ou grecs tels que Pline l’Ancien, Diodore de Sicile mais aussi Jules César vont nous renseigner sur la société celtique et bien évidemment, les druides. « Les premiers [les druides] s’occupent des choses de la religion, ils président aux sacrifices publics et privés et règlent les pratiques religieuses ; les jeunes gens viennent en foule s’instruire auprès d’eux, et on les honore grandement ». (Jules César, Commentaires sur la Guerre des Gaules, Livre VI, 13). Les druides sont donc les intermédiaires entre les dieux et les hommes. Ils sont chargés de la célébration des cérémonies sacrées et eux-seuls ont le droit de pratiquer les sacrifices.
En lisant Strabon (Ier av-Ier ap), on apprend que les druides faisaient partie de la classe sacerdotale de la société gauloise. Cette classe sacerdotale était composée de trois types d’hommes : les druides (terme générique qui s’applique à tous les membres de la classe sacerdotale, dont les domaines d’attribution sont la religion, le sacrifice, la justice, l’enseignement, la poésie, la divination, etc ; le barde est spécialisé dans la poésie orale et chantée ; le vate qui est un devin, s’occupe plus particulièrement du culte, de la divination et de la médecine.

Les sources archéologiques

Mais, peut-on réellement s’appuyer sur ces sources antiques pour comprendre qui ils étaient ? Jean-Louis Brunaux n’hésite pas à remettre en question ces témoignages et réhabiliter celui de Posidonios d’Apamée (IIe-Ier siècles av.J.-C) qui a servi de sources à tous ses successeurs (Posidonios voyagea en Gaule 50 ans avant sa conquête par César, il en définit les frontières et les dernières découvertes archéologiques confirment la véracité de sa description des sanctuaires. Il décrivit aussi les mœurs et la structure sociale). Jean-Louis Brunaux s’appuie également sur les sources archéologiques.
Ces dernières nous renseignent sur les sanctuaires. Le plus connu est celui de Gournay sur Aronde dans l’Oise. Les résultats des fouilles ont révolutionné la conception qu’on se faisait de l’activité religieuse des Gaulois. Pour le comprendre, il faut rappeler comment était vue cette religion il y a seulement trente ans. La connaissance dépendait alors exclusivement de la lecture des textes antiques qui chacun à sa manière a évoqué les druides ou prêtres gaulois, leurs dieux et quelques cérémonies.

Reconstitution du sanctuaire de Gournay sur Aronde au IIIe siècle av.J.-C, dessin de J.-L Brunaux
Le temple se trouve à l’intérieur d’un enclos fermé par une palissade et d’un fossé.

Par contre, l’identification archéologique des druides reste difficile. Dans la nécropole de Pogny (département de la Marne), la sépulture d’un guerrier renfermait des instruments (une patère en bronze et deux cuillères plates) que l’on suppose être médicaux. La médecine étant exclusivement du ressort des druides, il est possible que l’homme inhumé dans cette tombe fût l’un d’eux.

Instrument de bronze
Trois objets en bronze dont une cruche, une poêle et une marmite.

La religion des Gaulois

Ainsi, que sait-on aujourd’hui sur leur religion ? Nous savons que l’année celtique, marquée d’une saison sombre et d’une saison claire, comporte quatre grandes fêtes religieuses au caractère obligatoire :
- la fête de Samain située approximativement le Ier novembre et qui marque le début de l’année liturgique celtique.
- Imbolc est le 1er février. C’est la purification qui marque la fin de la période hivernale.
- Beltaine les « feux de Bel » au 1er mai. C’est la deuxième date la plus importante du calendrier. C’est une fête sacerdotale en rapport avec Belenos et de sa parèdre Belisama, qui marque le passage de la saison sombre à la saison claire avec le changement d’activités que cela implique. Les druides allument de grands feux pour protéger le bétail, essence même de la richesse.
- Lugnasad est l’ « assemblée de Lug » le 1er août. Cette fête est associée à la moisson, aux bénéfices et à l’abondance.

Il y avait également des fêtes à chaque solstice et équinoxe. Mais, la célébration la plus connue est celle de la cueillette du gui décrite par Pline l’Ancien. Ce dernier nous apprend que les druides allaient en forêt pour couper le gui sacré (symbole de l’immortalité de l’âme) le sixième jour de l’année celtique. Ils coupaient le gui en s’exclamant : « O Ghel an Heu » ce qui signifie littéralement « Que le blé germe ». Pline l’Ancien décrit les druides comme étant vêtu de blanc avec une serpe d’or. Un mythe est né ! Ce cérémonial est maintenant considéré, en partie du moins, comme une légende colportée par des historiens de l’Antiquité, relayés à l’époque moderne.

Le gui n’était pas la seule plante utilisée par les Celtes ; la pharmacopée était riche. Deux sources antiques nous renseignent sur ce sujet. Dans son livre intitulé De medicamentis liber, Marcellus de Bordeaux (IVe siècle ap.J.-C) énumère 150 plantes utilisées en Gaule. Il ne faut pas oublier l’ouvrage de Dioscoride (Ier siècle ap.J.-C), De materia medica, qui décrit plus de 600 plantes et presque 1000 remèdes.

Ainsi, les druides utilisaient également l’aigremoine, la ronce, la fougère lin, le lierre, la menthe, l’anis, le basilic. On peut également citer la bétoine, plante astringente, et la verveine commune surtout employée dans les maux d’yeux. L’ail avait de multiples applications : dans les dermatoses, dans les affections du rein et de la rate, dans les maux d’estomac. Les graines et le jus de concombre sauvage étaient employés contre certaines dermatoses et comme laxatif. Le fenouil, surtout la racine, est rencontré fréquemment dans les recettes, surtout pour les maux de reins. Mais les druides utilisaient aussi des plantes exotiques provenant vraisemblablement de la Méditerranée et du Moyen Orient : l’aloès, la cannelle, l’encens, la myrrhe, le myrte, l’opium, le poivre, le safran, et sans doute le gingembre. Les plantes étaient également récoltées avec un certain cérémonial : cueillette lors du solstice d’été, verveine coupée les nuits sans lune etc.

Un autre témoin de la science druidique est le grand calendrier épigraphique, rédigé en gaulois et daté du IIe siècle ap.J.-C. Il s’agit du « calendrier de Coligny », surnommé ainsi car il a été retrouvé dans le village de Coligny dans l’Ain. Ce dernier atteste de leur grande connaissance de l’astronomie. C’est aussi un document linguistique qui contribue à la connaissance du vocabulaire de la langue gauloise. L’objet se présente sous la forme d’une table aux dimensions de 1,50 m sur 0,90 m, les fragments assemblés couvrant les deux tiers de la surface totale. Les lettres et chiffres sont gravés en caractères romains, mais la langue est gauloise. Le document comporte 2 000 mots inscrits sur 16 colonnes et 2 200 lignes : c’est le plus long connu en cette langue. C’est un calendrier luni-solaire qui présente 5 années de 12 mois de 29 ou 30 jours. Le jour gaulois se compose d’une nuit suivie d’une journée, cette durée se nomme « latis » (pl. « lates »). Le changement de date intervient au coucher du soleil. L’ajout de deux mois supplémentaires est nécessaire pour le faire coïncider avec le calendrier solaire, à la fin d’une période de 30 ans, période qui correspond à un « siècle » celtique.

Le calendrier de Coligny, IIe siècle ap.J.-C
Fragments en bronze du calendrier.

Il serait donc intéressant de travailler plus spécifiquement sur la vision du monde des Druides, leur philosophie et essayer de comprendre leurs rapports avec la nature en général et la forêt plus particulièrement afin de faire le lien avec le programme « Perception ». Qu’y faisaient-ils ? Quelles relations avaient-ils avec le milieu sylvestre ? On a vu que les druides avaient certaines connaissances également en astronomie. Pourquoi ne pas faire des recherches plus poussées et faire un pont avec le programme « Univers » : quelles connaissances avaient nos ancêtres ? Les enfants se rendraient compte que certaines civilisations (pas seulement les druides) avaient des savoirs poussés en la matière.

Ainsi, nous sommes bien loin de la figure affable de ce bon vieux Panoramix et encore plus loin de celle du prêtre sacrificateur d’hommes ou des druides folkloriques actuels. Les recherches actuelles nous dépeignent l’image de philosophes chargés par la société gauloise des choses sacrées, ni vraiment prêtre ou devin, ni totalement juge mais un mélange de tout cela.

Pour aller plus loin :
Brunaux, J.-L, 2006, Les Druides, des philosophes chez les Barbares. Le Seuil, Paris.
Laffranque, M, 1964, Poseidonios d’Apamée. PUF, Paris.

Sources antiques :
Pline l’Ancien, Histoire naturelle.
Strabon, Géographie.
Jules César, Commentaires sur la Guerre des Gaules.
Marcellus de Bordeaux, De medicamentis liber.
Dioscoride, De materia medica.

FAQ

Posez une question

Bonjour,
j’aimerais savoir quelle(s) source(s) prouve(ent) que « O ghel an eu » était prononcé par les druides lors de cette cueillette rituelle du gui, car dans le texte de Pline, il n’en est pas question !
Je ne trouve pas non plus de trace de cette expression dans des textes moins anciens : serait-ce une invention plutôt récente, comme beaucoup d’autres, au sujet des gaulois ?

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